Dématérialisation à l’OFPRA
Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides

Depuis le mois de mai 2022, l’OFPRA a mis en place la dématérialisation des courriers à destination des demandeurs d’asile.
Concrètement, ça veut dire quoi ?
Avant la dématérialisation, les demandeurs d’asile se rendait régulièrement dans une SPADA* pour récupérer leur courrier. Ils récupéraient en même temps les courriers de l’OFPRA.
Aujourd’hui, lors de son premier passage en préfecture, en plus des documents habituels, le demandeur d’asile reçoit un document supplémentaire concernant la dématérialisation : celui-ci est en français et lui indique son login, sa clé de connexion.
Le demandeur aura ainsi accès à un « espace numérique personnel sécurisé » sur le site de l’OFPRA. Les courriers de l’OFPRA arriveront sur cet espace que le demandeur d’asile devra obligatoirement consulter pour avoir en particulier deux documents essentiels : la convocation pour l’entretien individuel et la décision prise par l’OFPRA.
L’OFPRA envoie un SMS sur le téléphone du demandeur pour lui indiquer qu’il a un nouveau document à consulter. Le demandeur peut accéder à son espace personnel sur les bornes en libre-service de la SPADA, sur tout autre ordinateur ou sur son téléphone s’il possède un smartphone et un accès internet.
Le demandeur a 15 jours pour prendre connaissance d’un document et au bout de ces 15 jours, même non lu, l’OFPRA considère que la personne a pris connaissance du document.
Toute personne ne se présentant pas à une convocation OFPRA voit sa demande d’asile rejetée, sauf si cette personne arrive à justifier son absence dans un délai de 7 jours.
Et comment s’en sortent les demandeurs d’asile :
Depuis la mise en place de cette dématérialisation, un nombre important de personnes se sont présentées à l’ADA inquiètes de ne pas avoir reçu de convocation à l’OFPRA.
Plusieurs raisons à cela : le demandeur n’a pas reçu le SMS de l’OFPRA car il a perdu ou on lui a volé son téléphone, ou il n’a pas de smartphone ou pas accès à internet ou encore n’a pas les compétences nécessaires pour naviguer sur internet sur les bornes mises à disposition à la SPADA (la SPADA aide les demandeurs pour l’utilisation de ces bornes mais encore faut-il que la personne comprenne l’enjeu et demande de l’aide).
Si la personne s’est bien rendue à sa convocation de l’OFPRA, il faut attendre entre 15 jours et 3 mois délai légal pour obtenir la décision mais cela est souvent plus long. Par contre une fois la décision déposée sur son espace personnel et considérée notifiée (lue ou pas lue), s’il s’agit d’un rejet, la personne a 15 jours pour faire une demande d’aide juridictionnelle* auprès de la CNDA* et un mois pour envoyer son recours.
Des problèmes de connexion informatique peuvent donc avoir de graves conséquences pour la procédure de demande d’asile de la personne.
L’OFPRA avance comme bénéfices de la dématérialisation, « l’autonomie et facilité d’accès, le gain de temps et le suivi individualisé« .
Si la fracture numérique est déjà un véritable problème en France, on imagine bien que celle-ci est encore plus flagrante pour des personnes en grande précarité et ne parlant pas français (plus d’un demandeur d’asile sur deux n’est pas hébergé dans le DNA* et parmi ceux-là, peu peuvent compter sur l’aide d’un travailleur social). Où est le gain en autonomie et en facilité d’accès pour le demandeur d’asile ?
Le gain de temps est un bénéfice pour l’OFPRA mais en aucun cas pour le demandeur d’asile. Pour lui les délais n’ont pas changé et le suivi individualisé est encore un argument purement administratif.
Cette dématérialisation n’apporte aucun avantage aux demandeurs d’asile. Au contraire, les personnes sans culture numérique ou ne maitrisant ni le français ni l’anglais, ne peuvent que se reposer sur les associations accompagnant les demandeurs d’asile. Cela génère une augmentation de la charge de travail dans les associations qui doivent expliquer aux personnes comment accéder au site internet de l’OFPRA ou consulter pour eux leur espace personnalisé.
A l’ADA nous constatons que le nombre de personnes ne s’étant pas rendues à la convocation OFPRA de façon non volontaire est plus important suite à la dématérialisation. Dans ce cas, l’ADA aide le demandeur d’asile à rédiger un recours gracieux auprès de l’OFPRA en expliquant les difficultés rencontrées dues à la dématérialisation et en même temps un recours succinct à la CNDA. Aucun des recours gracieux envoyé à l’OFPRA jusqu’à présent n’a donné lieu à une nouvelle convocation à l’OFPRA.
L’impact est d’autant plus grave pour les personnes en procédure accélérée venant de pays sûrs* qui reçoivent une OQTF* dans les jours suivants la décision de l’OFPRA.
- SPADA : Structure de Premier Accueil des Demandeurs d’Asile
- CNDA : Cour Nationale du droit d’Asile
- DNA : Dispositif National d’Accueil
- Aide Juridictionnelle : prise en charge par l’Etat du coût de la procédure de justice
- Pays sûrs : Liste établie par le conseil d’administration de l’Ofpra, constituée de 13 pays des Balkans, l’Inde, le Cap Vert et l’île Maurice.
- OQTF : Obligation de Quitter le Territoire Français