L’OFII : un durcissement systématique
des pratiques d’accueil des demandeurs d’Asile
L’OFII, Office Français de l’Immigration et de l’Intégration, est un des piliers de la politique de l’accueil des demandeurs d’asile en France.
L’OFII est présent dans les guichets uniques d’accueil des demandeurs d’asile (GUDA). Il évalue la vulnérabilité des demandeurs, gère le réseau d’hébergement et verse une allocation (ADA) selon le profil du demandeur
L’OFII est chargé de mettre en œuvre les conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile et notamment de décider qui peut en bénéficier et éventuellement de les retirer en cas de « manquement » allégué du demandeur.
L’OFII pilote les structures de premier accueil des demandeurs d’asile (SPADA). Il collabore avec des opérateurs extérieurs dans le cadre d’un marché public.
L’OFII coordonne le Dispositif National d’Accueil (DNA) des demandeurs d’asile et des réfugiés. Il supervise l’attribution des places d’hébergement aux demandeurs d’asile dans les différents centres :
- Centres d’Accueil pour Demandeurs d’Asile (CADA)
- Centres Provisoires d’Hébergement (CPH) des réfugiés
- Autres dispositifs d’hébergement relevant du DNA.
C’est dire le rôle central de l’OFII dans les conditions de vie quotidienne des demandeurs d’asile. On ne peut que constater que les pratiques mises en œuvre par l’OFII en ce qui concerne les conditions matérielles d’accueil des demandeurs d’asile ont pour conséquence inéluctable de mettre en cause l’effectivité du droit d’asile, au même titre que les lois restrictives mises en place depuis plusieurs années.
En principe, les conditions matérielles d’accueil (CMA) permettent aux personnes demandant l’asile d’obtenir un hébergement et une allocation pour demandeur d’asile (ADA) durant toute la procédure d’examen de leur dossier. Le montant de l’ADA est de 6,80 €/jour pour une personne seule majorée de 7,40€/jour si elle n’est pas hébergée.
La notion de « conditions matérielles d’accueil » est issue de la directive européenne « Accueil » 2013/33/UE du 26 juin 2013. Cette notion recouvre « les conditions d’accueil comprenant le logement, la nourriture et l’habillement, fournis en nature ou sous forme d’une allocation financière ou de bons, ou en combinant ces trois formules, ainsi qu’une allocation journalière » (art. 2). Les CMA sont prévues par les articles 17 à 20 de la directive « Accueil ». Cette directive fait partie du « paquet asile » ou « régime d’asile européen commun ». Ces règles qui visent à uniformiser le droit d’asile dans l’Union européenne (UE) ont dû être transposées dans leur législation par tous les États membres. La France s’est mise en conformité avec ces textes en adoptant la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015.
Depuis plusieurs années les Associations de soutien aux demandeurs d’Asile, comme les organes de presse se font l’écho de mesures de plus en plus restrictives et punitives mises en œuvre par l’OFII en direction des demandeurs d’asile.
Le Défenseur des droits a été saisi à de nombreuses reprises pour des manquements de l’OFII à ses obligations concernant les conditions matérielles d’accueil. Le Défenseur des droits a donc alerté le Ministère de l’Intérieur ou l’OFII pour des exclusions abusives d’un hébergement, pour des suspensions de CMA en contradiction avec les décisions de la Cour Européenne de Justice sur l’application de la directive Accueil
Ainsi la carte de retrait sur laquelle était versée l’Allocation Demandeur d’Asile (ADA) a été convertie en carte de paiement utilisable seulement sur des terminaux de paiement électronique, empêchant toute transaction par paiement direct et rendant la vie des demandeurs d’asile encore plus difficile.
En contradiction avec la directive européenne l’OFII applique comme seule sanction le retrait total des CMA alors que la directive européenne dans son article 20 stipule que les Etats membres peuvent limiter ou, dans « des cas exceptionnels et dûment justifiés », retirer le bénéfice des conditions matérielles d’accueil. En France, il n’y a pas de « limitation » ; on ne pratique que le retrait total.
Parmi les motifs de retrait des CMA certains sont particulièrement iniques : s’absenter de son lieu d’hébergement pour plus de 24 heures sans prévenir, ne serait-ce que pour rendre visite à un ami ou déposer sa demande d’asile après la limite de 90 jours de présence sur le territoire. Dans ce dernier cas, le demandeur se voit refuser les CMA sans information de l’OFII ni étude de sa vulnérabilité et doit rédiger un Recours Administratif Préalable Obligatoire auprès de l’OFII à Paris pour demander l’annulation de cette décision. L’OFFI s’accorde 2 mois de délais pour répondre et « pas de réponse » dans ce délai signifie un rejet implicite du recours.
Ces mesures très restrictives ont évidemment un double objectif :
- Réduire le budget des Aides aux Demandeurs d’Asile, une économie de 65 millions d’euros a ainsi été réalisée par l’OFII sur son budget 2021.
- Rendre plus difficile l’accès aux CMA auxquelles les demandeurs d’asile ont droit et les priver de leurs droits de recours car pour cela faut-il encore pouvoir être en capacité de le rédiger. Sans association soutenant le droit d’asile et les demandeurs, ces démarches sont extrêmement difficiles.
On ne peut que constater que l’OFII est un outil essentiel
à la mise en œuvre d’une politique de plus en plus répressive
vis à vis de l’accueil des migrants.