L’ADA condamne fermement l’expulsion d’un réfugié tchétchène en Russie le 09/04/2021
M. G. reconnu réfugié au titre de la Convention de Genève de 1951 a pourtant été expulsé en Russie où il a été démontré qu’il avait des craintes en cas de retour. Si en 1951, les rédacteurs de la Convention de Genève ont bien prévu, en son article 33§2, que peuvent être refoulés vers leurs pays d’origine les réfugiés qui constituent une menace pour l’ordre public, le HCR rappelle que cette disposition « n’affecte pas les obligations de non-refoulement de l’État d’accueil telles qu’elles découlent du droit international des Droits de l’Homme qui ne prévoit aucune exception. Ainsi l’État d’accueil ne pourrait pas renvoyer un réfugié, si cela avait pour effet de l’exposer, par exemple, à un risque substantiel de torture » (avis consultatif de 2007, § 11). L’article 21 DQ est aussi très clair sur la prise en compte des autres obligations internationales des Etats, parmi lesquelles il suffit de mentionner l’application des art. 6 et 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l’art. 3 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, les art. 4 et 19 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, et l’art. 3 de la Convention européenne des Droits de l’Homme. Le principe de non-refoulement des personnes vers un autre État où il y a des motifs sérieux de croire qu’elles risqueraient d’être soumises à la torture est absolu.
En l’espèce, la qualité de réfugié n’étant pas mise en cause, les craintes de persécutions en cas de retour dans le pays de nationalité restent intactes, si bien que le risque d’atteintes aux droits fondamentaux en cas d’éloignement est caractérisé.
Comme le soulignent Amnesty International et le Comité Tchétchénie, la CNDA a rendu le 10 mars 2021 un avis favorable au renvoi en Pologne de M. G. où il a été reconnu réfugié et non en Russie. Dans son avis, la Cour relève que la qualité de réfugié de Monsieur G. est établie : « pour l’application de l’article 33 de la convention de Genève, l’intéressé est un « réfugié » quand bien même les autorités compétentes ne se sont pas prononcées définitivement sur sa demande d’asile. Ainsi, M. G. est un réfugié au sens et pour l’application de l’article L. 731-3 précité du « Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ».
La Cour Nationale du Droit d’Asile relève également que toutes les assurances doivent être prises pour que, en cas de renvoi en Pologne, aucun renvoi vers la Russie ne soit exécuté : « compte tenu du refus exprimé par les autorités polonaises de réadmettre l’intéressé sur le territoire polonais et dans la mesure où la qualité de réfugié ne lui est plus reconnue par cet État, il y a lieu de s’assurer que ces autorités s’abstiendront de toute mesure d’éloignement en direction de la Russie ».
Elle rappelle que « les craintes de persécution vis-à-vis de la Russie, résultant de la décision de l’OFPRA du 19 octobre 2020, imposent à la France, en vertu des termes de la décision déjà mentionnée de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) du 14 mai 2019 de veiller à ce qu’il ne soit pas dérogé au principe de non-refoulement en se fondant sur l’article 33, paragraphe 2, de la convention de Genève ».
L’ADA-Accueil Demandeurs d’Asile soutient la demande de rapatriement de M. G. et presse le gouvernement de ne pas recourir à de nouvelles expulsions de réfugiés : quand bien même ils en auraient perdu le statut, ils en conservent la qualité.
Jacqueline LEININGER
Présidente de l’ADA
Jean-Michel REYNAUD
Vice-Président de l’ADA

