Lettre ouverte Couvre-feu

Grenoble, le 16/10/2020
Monsieur le Préfet
Mesdames et Messieurs les Sénateurs
Mesdames et Messieurs les Députés
Monsieur le Président de Grenoble Alpes Métropole
Monsieur le Maire de Grenoble
Madame la Directrice territoriale de l’OFII
Mesdames, Messieurs,
Le Président de la République et le gouvernement ont annoncé l’entrée en vigueur d’un « couvre-feu » en région parisienne et dans 8 grandes métropoles dont Grenoble Alpes Métropole. Cette mesure vise à ralentir la progression de l’épidémie de Covid-19 dans ces territoires.
L’association ADA-Accueil Demandeurs d’Asile appelle à une prise en compte des personnes à la rue en situation de grande précarité, notamment les demandeurs d’asile.
Mardi 6 octobre, Médecins sans Frontières, s’inquiétait dans une étude des taux élevés de contamination chez les personnes en situation de grande précarité (près d’un sur deux dans les centres d’hébergement d’Ile de France).
Ce jour, la Fondation Abbé Pierre alerte sur la situation des plus précaires.
Les centaines de personnes qui appellent chaque jour le 115, parce que sans solution d’hébergement pour la nuit, sont dans l’impossibilité manifeste de respecter le couvre-feu. Nous nous interrogeons sur la prise en compte de leur situation par les pouvoirs publics.
Au-delà des risques de contagion, les personnes à la rue devront également redouter l’amende de 135 euros. Leur situation n’est pas reconnue parmi les motifs d’attestations dérogatoires – toujours pas disponibles à cette heure – et aucune mise à l’abri n’est prévue.
Plusieurs personnes avaient été verbalisées durant la période de confinement et les situations avaient dû être remontées ensuite en préfecture pour que les amendes soient finalement retirées. Les leçons auraient pu être tirées afin de prévenir ces situations.
La situation aujourd’hui pour les demandeurs d’asile est loin de s’être améliorée puisque seuls les deux tiers des demandeurs d’asile sont pris en charge soit par l’OFII dans un hébergement du dispositif national d’accueil, soit par le SIAO dans l’hébergement d’urgence inconditionnel. Des structures ouvertes lors du confinement ont fermé. Cela laisse un tiers d’entre eux, des centaines de personnes, sans abri. Le plus souvent, ces personnes errent durant la nuit et trouvent un lieu où dormir durant la journée. Parmi ces personnes, un grand nombre sont accompagnées d’enfants et/ou souffrent déjà de troubles de santé.
Par un arrêt du 2 juillet 2020, la Cour européenne des Droits de l’Homme a condamné la France pour avoir violé l’article 3 de la convention européenne des Droits de l’Homme en laissant des demandeurs d’asile à la rue pendant plusieurs mois.
À l’heure où les questions de vulnérabilité et de précarité se posent avec acuité, il est urgent de prendre les mesures appropriées visant à protéger ces personnes, et par conséquent de la population dans son ensemble, et ce dans le même souci évident de lutter contre la propagation du virus.
Nous vous demandons d’ouvrir de toute urgence des dispositifs d’accueil, et d’organiser, par le biais de l’OFII et du SIAO, la mise à l’abri immédiate et durable des personnes à la rue, de manière inconditionnelle.